Lancé en 2007, le blog Embarquements cesse momentanément ses parutions.
JOYEUX ANNIVERSAIRE !
C’est aujourd’hui les 85 ans de la Route 66 ! Lancée officiellement le 11 novembre 1926, l’US 66 se confond avec l'Histoire moderne des Etats-Unis d'Amérique. Extraits de l'Historique que j'ai écrit dans notre ouvrage intitulé SUR LA ROUTE 66 - carnets de voyage paru aux éditions de la Martinière. Une Histoire singulière. Et étonnante ?
« Imaginée dès sa conception comme une « voie expresse », la Route 66 va d’emblée symboliser la liberté sans précédent de voyager à travers l'Ouest américain.
Née sous l’impulsion d’entrepreneurs dynamiques de la trempe d’un dénommé Cyrus Avery dans l'Oklahoma, l’idée originelle consistait à relier par un seule et même axe routier Chicago à Los Angeles afin de faciliter les échanges surtout commerciaux.
Si d'autres routes connecteront l’Est et l’Ouest, elles suivront chacune un parcours plus linéaire et, surtout elles tiendront à l’écart les communautés rurales, celles du cœur des Etats-Unis souvent laissées pour compte du progrès.
Dès sa construction, la « Soixante-Six » va ainsi s’avérer utile au développement économique d’un pays au point de devenir rapidement une artère vitale, ce qui lui vaudra d’ailleurs d’être habilement appelée par ses promoteurs comme la « Rue principale d’Amérique (Main street of America).
La Route 66 va dès lors épouser l’Histoire d’une jeune nation, une histoire rythmée en ce début de vingtième siècle par de nombreux soubresauts.
A commencer par la « Grande dépression » suivi d’un autre épisode tragique survenu en 1934 : le Dust bowl.
Cette série de tempêtes de poussières va pousser des centaines de milliers d’habitants du Middle west, cœur agricole du pays, à fuir leurs terres et emprunter la « Soixante-Six » pour tenter d’atteindre un Eden : la Californie. Ce drame inspirera à John Steinbeck un roman magistral : « Les Raisins de la colère » (The Grapes of Wrath) paru en 1939.(…)
La Route 66 va pourtant être victime du progrès et en quelque sorte de son succès. « Deux-voies » trop étroite, trop sinueuse pour abolir les distances et trop fréquentée, la « Route-mère » devient la « Route tueuse », la « Route dévoreuse » et la source de tous les maux.
Impressionné par le réseau autoroutier allemand, le président Eisenhower décide au milieu des années 1950 de la mise en place d’un réseau d’autoroutes plus larges, plus sûres et plus sécurisées à travers tout le pays.
Si la Route 66 parait condamnée, elle continuera néanmoins d’être empruntée et vénérée par des générations de voyageurs sûrement un brin nostalgiques des « années glorieuses ».
Axe routier chargé de symboles, la « Soixante-Six » nourrit en effet l’imaginaire de tout voyageur, tout en participant à la représentation que chacun se fait des Etats-Unis. Celle d’un pays conquis par des pionniers, progressant coûte que coûte, vaille que vaille vers l’Ouest attirés par les rumeurs de richesses.
1984 à Williams dans l'Arizona, le dernier tronçon original est contourné par l’Interstate 40. Rayée des cartes routières et définitivement déclassée en 1985, la Route 66 n’est plus.
D’innombrables villes fantômes vont ainsi naître sur la « Route-Mère », délaissée et abandonnée. C’était sans compter sur la ferveur et l’opiniâtreté d’irréductibles passionnés qui tel un Phénix vont faire renaître la « Soixante-Six » de ses cendres.
Leur entreprise sera d’abord modeste. Ils planteront d’abord des panneaux signalant les portions de la « vieille route » afin de capter l’attention des voyageurs et les guider.
En fédérant leurs énergies, ils alerteront ensuite les autorités fédérales quant à la réhabilitation de cette pièce phare du patrimoine de l’Amérique. Route à fort patrimoine « génétique », l’empreinte de la « Soixante-Six » est selon eux indélébile.
« La Route 66 est éternelle. Personne ne pourra la détruire », prédisent d’ailleurs ses farouches partisans et ardents défenseurs.
Si cette voie de communication n'est évidemment plus ce qu'elle était pendant ses années glorieuses, surtout à l’approche des grandes villes et de leurs périphériques où la Route 66 a été littéralement avalée, de nombreux tronçons subsistent.
Mieux ses forts pouvoirs évocateurs demeurent. En témoignent les nombreux vestiges continuant de peupler cet axe routier chargé de symboles, les multiples opérations de réhabilitation et les touristes toujours plus nombreux.
Des voyageurs, venus du monde entier, pour palper à leur tour un morceau du rêve américain »
Stéphane DUGAST
Photographies de Christophe GERAL