ARBEZ, JUSTES PARMI LES JUSTES [BEST-OF]

Angèle Arbez (103 ans) n'est plus. Adieu à cette fière Jurassienne, épouse de Max Arbez, un « Juste » pendant la Seconde guerre mondiale, et un fidèle ami de l’explorateur Paul-Émile Victor. Hommage et explications. Premier des 8 reportages best-of diffusés chaque week-end cet été sur le blog Embarquements.

› LE CONTEXTE

Préparant la biographie de Paul-Émile Victor (1907-1995), en co-écriture avec Daphné sa fille, nous interrogeons depuis deux ans de nombreux témoins, dont ses proches, ses amis, ses collègues et tous ceux qui l’ont approché de près au cours de son existence.

Nous avons ainsi interviewé Angèle, la femme de Max, qui avait su nous parler avec faconde de l’explorateur médiatique qu’elle continuait d’appeler «Paul», qu'elle et son mari avaient rencontré dans les années 1920.

Le jour de l'interview, à l’hôtel Franco-Suisse, l’émotion était palpable. Angèle, souriante et alerte, s’était confiée à nous sans fard, et avec un naturel réjouissant malgré ses 101 printemps.

L’été dernier, je lui ai montré les images : «Oh, il ne fallait pas…». Elle a été presque gênée de se voir à l’écran. Angèle était plutôt captivée par les témoignages de Nicolas Hulot, Jean-Louis Étienne & consorts parlant de Paul-Émile Victor - dont la seule évocation lui rappelait sûrement Max son mari.

Angèle Arbez vient de décéder. Le petit village de La Cure doit sembler bien vide, elle qui l'habitait depuis plus de huit décennies.

Adieu donc, Angèle. Modestement, notre livre et un film documentaire vous rendront hommage. Mes pensées vont à vos proches, à votre famille - dont notamment votre fille Maryse.

› LA SAGA ARBEZ

Le 6 octobre 2013 à la salle de l’Omnibus des Rousses (Jura), Angèle Arbez (103 ans) et sa famille ont reçu des mains de Rachel Feinmesser, Ministre aux Affaires Politiques à l’Ambassade d’Israël à Paris, la médaille des Justes parmi les Nations, décernée à titre posthume à Max Arbez.

Rappelons que la médaille des Justes est décernée par l’institut Yad Vashem de Jérusalem, aux personnes non juives qui ont sauvé des juifs sous l’Occupation, au péril de leur vie.

Max Arbez, restaurateur-hôtelier et propriétaire de l’Hôtel franco-suisse, a permis, pendant la deuxième guerre mondiale, le passage de centaines de personnes dont de nombreux juifs, vers la Suisse ou de l’autre côté de la ligne de démarcation.

À noter que la Franche-Comté compte 38 Justes. Ils sont 3 694 en France à ce jour à avoir reçu cette distinction. 

En savoir plus sur Max Arbez (sa fiche Wikipedia)

› UNE INDISCRÉTION

Écrire la biographie de Paul-Émile Victor (1907-1995), c’est forcément raconter les années jurassiennes de l’explorateur polaire. Court extrait de ce livre* à paraître en 2015, - un passage où il est question de Max Arbez...

« Un jour de 1926, Paul et ses amis s’arrêtent pour boire et se réchauffer à l’Hôtel franco-suisse, dans le hameau de La Cure. Ils ont entendu parler du chaleureux accueil réservé par Jules-Joseph et Eugénie Arbez, et sont curieux de voir de près ce petit hôtel, véritable aberration de l’Histoire, construit à cheval sur la frontière franco-suisse. (…) Un jeune homme, pourtant, s’approche paisiblement d’eux, les yeux clairs et le regard mi-rieur, mi-sérieux des gens intéressés à découvrir ce qu’ils ne connaissent pas. Il a pratiquement le même âge qu’eux tous et se présente très naturellement, sans phrases superflues : «  Bonjour, Messieurs Dames. Je m’appelle Max. Max Arbez. Qu’est-ce que je vous sers ? »…. »

* : Paul-Émile Victor, J’ai toujours vécu demain. Une biographie de Daphné Victor & Stéphane Dugast à paraître aux éditions Robert Laffont.