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SES « AMIS » TOUAREGS
Conférencier, photographe et documentariste, Jean-Pierre Valentin parcourt depuis 30 ans le territoire des Touaregs. C'est donc en fin connaisseur que le Vosgien porte un regard sur les évènements en cours au Nord-Mali. Claude Vautrin, journaliste de 100% Vosges Le Mag, l'a récemment interrogé. Extraits...
« Connaisseur et ami du peuple touareg, le Vosgien Jean-Pierre Valentin, documentariste spécialiste de la région, porte logiquement un regard éclairé sur les évènements qui se jouent au Sahara central.
Son dernier séjour date de l’été 2012 où, à Niamey (Niger), il tournait des séquences de son prochain film « Touaregs, l’âme bleue du désert », un document sur « le monde touareg contemporain ».
Ses témoins ? Des responsables politiques, des exilés fuyant Bamako, devenu indésirable au peuple nomade, mais aussi des musiciens, tel Tinariwen, un groupe du nord-est du Mali né de la rébellion indépendantiste des années 1990, dont « les textes diffusés par cassette de campement en campement étaient parole de résistance ». Et le restent.
Le dernier coup de fil satellitaire de Jean-Pierre Valentin, avant notre entretien, avait pour interlocuteur Altanata ag Ebalagh, le trésorier du MNLA, le Mouvement National de Libération de l’Azawad (Nord Mali), entré à nouveau en rébellion en janvier 2012 contre l’armée du Mali, mais aussi les terroristes islamistes, qu’il vient de chasser « de plusieurs villes de l’Azawad, dont Kidal».
Car la situation est complexe, qui assimile trop souvent les islamistes en guerre aux Touaregs, avec les règlements de compte qui en découlent.
« On accuse les Touaregs d’avoir donné un coup de pied dans la fourmilière, quand après avoir demandé depuis dix ans l’éradication des islamistes, l’appel est resté lettre morte, du fait de la collusion de ces derniers avec l’ancien pouvoir malien », commente Jean-Pierre Valentin.
Et d’évoquer les liens depuis 2005 noués avec les « narco-djihadistes » dont la cocaïne venue d’Amérique du sud en Europe, via la Guinée Bissau et le Sahara, a aussi enrichi les propriétaires maliens des « villas de la drogue de Gao ou Bamako ».
Rien n’est simple en effet qui a vu aussi, aux côtés d’AQMI, Al-Qaïda au Maghreb islamique, et du MUJAO, le Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest, l’émergence d’Ansar Dîne, « les combattants de la foi », des Touaregs venus à l’islamisme.
« Une minorité née de jeux troubles où l’argent a pesé. Les Touaregs sont à mille lieues de l’islamisme radical. Ils l’ont combattu de toujours ». En fait, la grande crainte du MNLA est de vivre une reprise en main de la zone par l’armée malienne » (Jean-Pierre Valentin)
Dès lors pour Jean-Pierre Valentin, la solution est simple : « Il faut associer le MNLA à la lutte en cours contre les salafistes. Tout en ouvrant rapidement des négociations dans l'objectif de trouver, dans le cadre d’une Fédération, une solution définitive au conflit qui oppose l'Azawad à l'Etat central du Mali depuis plusieurs décennies ».
Photographies © Jean-Pierre Valentin
Propos recueillis par Claude Vautrin - 100% Vosges Le Mag