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MÉMOIRES VIVES

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Correspondance des ministres, d’états-majors ou de commandants, journaux de bords, archives privées, cartes, atlas ou portulans… Les archives militaires sont une véritable mine aux trésors, permettant de lire autrement l’histoire de la France. Direction le château de Vincennes et le pavillon de la Reine pour une "aventure" dans les coulisses du monde des archives.

«Les archives du monde de la Défense sont essentielles pour l'histoire militaire mais également pour l'histoire culturelle, diplomatique, scientifique, économique ou sociale de notre pays et parfois d'autres nations», s’enthousiasme d’emblée Jean-François Dubos, chef du département de la bibliothèque du Service Historique de la Défense (SHD) au château de Vincennes.

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Situé à quelques encablures de Paris, les vieux murs de ce site historique, résidence royale du roi Louis-Philippe en 1180, abritent, des centaines de milliers de documents, datant du XIIe siècle à nos jours. Livres, journaux, revues, manuscrits ou atlas… Ces "trésors" sont jalousement gardés, et surtout conservés de façon optimale à Vincennes comme dans les collections réparties sur plusieurs sites en région. Brest, Cherbourg, Lorient, Rochefort et Toulon offrant logiquement des collections à fortes dominantes maritimes.

Direction les magasins du pavillon de la Reine et ses plancher grinçants. Monsieur Dubos a prévenu son équipe. C’est dans ces magasins que sont stockées les collections de l’ancien département Marine, soit près de 65 000 volumes imprimés, 100 000 périodiques et 1 000 manuscrits.

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Aucun lecteur, ni même visiteur ne pénètre d’ordinaire dans ces locaux sensibles. Volets clos, température régulée, livres et manuscrits impeccablement alignés, l’ordre règne dans ces magasins sous étroite surveillance : «Les livres et les ouvrages anciens n’aiment ni la chaleur, ni l’humidité, ni la poussière, ni la lumière. Plus important, ils supportent mal les variations ne serait-ce que de l’un de ces paramètres. D’où ces conditions de stockages optimisés. Nous veillons au grain si j’ose dire !», explique Colette Guiot.


Spécialisée en histoire militaire, sous tous ses aspects et à toutes les époques, les bibliothèques du SHD sont de véritables «mines aux trésors» et des passeports pour l’Histoire et le patrimoine militaire du XIIe siècle à nos jours.

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Des premiers atlas maritimes aux portulans les plus anciens, les archives Marine de la Défense sont d'une grande variété, et souvent l’œuvre d’ingénieurs autant que de cartographes ayant exercé leur Art à terre ou en mer. La preuve en images avec un Atlas datant de 1606, la traduction française d’un Mercator, du nom d’un mathématicien et géographe d'origine allemande qui a permis aux navigateurs de s'orienter grâce à son Atlas mondial paru en 1569[1]

«Une pièce très rare. Un atlas entièrement «fait main», si j’ose dire», s’enthousiasme Monsieur Dubos avant de se faire plus pédagogue : «Regardez sa tranche travaillée tout en doré et en relief. C’est du travail d’orfèvre, à coup sûr celui d’un artisan qui a travaillé grâce à des aiguilles émoussées et arrondies. Vous savez la couverture et la reliure d’un ouvrage, ce sont les vêtements du livre. Ouvrons ce livre avec précaution. Regardez l’encre, elle n’a pas subi les outrages du temps.

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Quant aux couleurs, je peux vous dire qu’elles ont été faites, en édition unique au pochoir. Les caractères, les colonnes, la lettrine en début de texte, les marges… La mise en forme est similaire à celle des livres médiévaux. Un connaisseur est vite renseigné. Et encore nous n’avons pas étudié le papier, son tramage, sa consistance, sa matière… S’agit-il de papier vélin fabriqué à partir de la peau d’un veau mort-né ? En enquêtant ainsi, on pourrait déterminer le maître-papetier, et en savoir plus sur ce présent ouvrage».

Autre trésor sorti de son écrin, un ouvrage aux armes de Colbert, marqué sur le plat "Dépôt général de la Marine". «Une pièce rare !», dixit Colette Guiot auprès de qui s’est joint deux collègues : Sylvie Legrosse et Martin Barros, 30 ans de SHD à eux à deux. Eux aussi sont intarissables dès lors qu’il s’agit de parler d’ouvrages anciens. Monsieur Barros est sur le qui-vive : «Et dire que l’on ne vous a pas encore parlé des couvertures : celles entièrement fabriquées en cuir, celles en plat cartonné. Et que dire des reliures. Saviez-vous que les encres les plus stabilisées sont celles de Chine, ou celles fabriquées à partir d’os calcinés, broyés et mélangés ? Pourquoi d’après vous les livres anciens ont-ils souvent une tranche dorée ?».

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Devant la mine interloquée de son visiteur, Madame Legrosse prend le relai: «Outre l’avantage esthétique, une tranche dorée empêche la poussière de passer. Cela limite les effets de jaunissement du papier du fait de l’air extérieur, de la poussière et de la lumière».

Plats, dorures, reliures, ex-libris et tranches, le vocabulaire des ouvrages anciens est assurément poétique. Les heures défilent ainsi vite dans les magasins du pavillon de la Reine, en compagnie de fins connaisseurs sortant de leur rayonnage des ouvrages anciens ou encore des portulans, ces  livres d’instructions nautiques utilisés du XIIIe siècle au XVIIIe siècle, servant aux marins à repérer les ports et à en connaitre les dangers comme les courants ou les hauts-fonds.

Ainsi conservées et archivés, les livres anciens et manuscrits sont une matière vivante précieuse permettant aux chercheurs comme au grand public de se plonger dans l’histoire militaire de la France, dont celle de la Marine. Car, n’est-ce pas le passé qui éclaire le présent, et qui permet souvent d’anticiper le futur ?

Stéphane DUGAST
Photographies © SHD Défense

 

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LES ARCHIVES DE LA DÉFENSE EN 5 DATES

1688 et 1699
Naissance respective des dépôts de la Guerre et de la Marine à l'instigation des secrétaires d'Etat Louvois et Pontchartrain.

1789
La Révolution française reconnait l'autonomie des services d'archives de la Guerre et de la Marine.

1919
Naissance du service historique de l'armée de Terre et celui de la Marine.

1979
La loi du 3 janvier confie les archives publiques à la direction des archives de France du ministère de la culture, à l'exception de celles émanant du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Défense.

2005
Fusion des services et des organismes au sein du Service Historique de la Défense (SHD).

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› À LIRE
Le Service historique de la Défense, un acteur essentiel de la politique de revendication des archives mise en place par le ministère depuis 2009 Un article de Michel Roucaud. Revue historique des armées, n°261 | 2010. Consultable en version électronique ICI



[1] : L’Atlas Mercator est une représentation du globe terrestre projeté sur un plan où les méridiens sont parallèles à l'Équateur. Les territoires polaires sont notoirement déformés, mais cette projection reste encore une des plus utilisées. Gérard Mercator (1512-1594) en est l’inventeur ainsi que de la notion d’ «Atlas». Il est le premier géographe à avoir conçu une représentation de notre Monde. Ses cartes et son Atlas sont les  fondements de la géographie et de la cartographie moderne.

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