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GROENLAND VERTIGO

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Groenland Vertigo, c'est un album graphique réjouissant signé Hervé Tanquerelle. Carnet de voyage d'une aventure vécue ? fiction doublement inspirée des aventures de Tintin et des racontars arctiques de l'écrivain danois Jörn Riel ? Les secrets de réalisation de cet album dévoilés par l'auteur nantais. Un entretien pas glacé du tout mené par notre chroniqueuse Dominique Simonneau.

Groenland Vertigo s'inspire de votre expérience personnelle à bord de la goélette Activ en 2011 : comment avez vous été embarqué dans ce projet de navigation vers le Groenland ?

Jonas Bergsoe, le capitaine de l'Activ, avait lu un article parlant de l'adaptation en Bande dessinée des Racontars Arctiques de Jorn Riel que nous avions réalisé avec Gwen de Bonneval. L'écrivain danois était invité à participer à cette grande expédition et Jonas a proposé que j'en fasse également parti. Jorn Riel a tout de suite accepté. Pour moi, c'était une occasion inespérée !


L'expédition réunissait artistes et scientifiques de renom à bord de ce magnifique voilier appartenant à un célèbre architecte allemand, commanditaire de l'expédition. Mais je confesse que mon danois inexistant et mon anglais hésitant ne m'ont pas permis de vraiment bien comprendre l'objectif de cette expédition privée, qui avait l'air bien alambiquée !

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Vous aviez déjà réalisé l'adaptation des Racontars Arctiques, Parlez nous de votre première rencontre avec l'auteur Jörn Riel.

Après la publication des deux premiers tomes de l'adaptation en bande dessinée des Racontars Arctiques, Gwen de Bonneval avait organisé une petite exposition au Lieu Unique à Nantes. Une première rencontre toute en retenue avec un Jörn Riel plutôt taiseux tirant sur son éternelle pipe. Il était très heureux de cette adaptation graphique.

En lisant ses racontars, j'avais tout de suite ressenti la puissance visuelle, graphique, tintinesque de ces récits d'aventures de trappeurs au nord-est du Groenland dans les années 50.

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Parlez nous de votre découverte du Groenland

Je mesure la chance incroyable que j'ai eu de pouvoir naviguer dans ce gigantesque parc national du nord est groenlandais, si difficile d'accès. A bord je lisais L'Igloo, de Paul-Emile Victor. J'étais très imprégné de ses descriptions lorsque nous avons abordé la côte. La nature y est si vaste, vierge de toute trace humaine si ce n'est quelques anciennes cabanes de trappeurs – celles si bien décrites par Jörn Riel dans ses Racontars Arctiques. On ressent quelque chose d'immuable dans cet environnement, les notions de distance y sont totalement bouleversées.

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Vous avez certainement vécu des moments intenses lors de votre navigation vers cette côte Est du Groenland

J'ai été vraiment saisi par mon premier quart à bord. Je ne comprenais absolument pas ce que l'on attendait de moi, lorsqu'on m'a réveillé en pleine nuit. C'était une totale découverte pour moi qui n'avais jamais navigué. J'étais à bord d'un magnifique voilier, entre l'Islande et le Groenland, je passais le cercle polaire, on me demandait de tenir la barre, tout était d'un calme impressionnant. Le soleil déclinait à l'horizon. C'était un moment vraiment magique.
C'est ce moment qui m'a inspiré les pages 19-20 de l'album, qui sont parfaitement autobiographiques !
Un autre moment très intense fut lorsque j'ai retrouvé à la toute fin du voyage la fameuse pipe perdue par Jörn. Elle était tout simplement au pied de sa couchette !

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Sur votre blog, vous dites : « J'ai envie d'une totale liberté pour déformer la réalité et les personnages, d'un droit au mensonge éhonté et à l'interprétation délirante des événements. ». Quelle est la part de fiction et la part carnet de voyage dans Groenland Vertigo ?

Mon carnet de voyage et mes croquis sont restés dans mes cartons pendant trois ans. Je savais que je ne pouvais pas me contenter d'un seul récit de voyage autobiographique.
J'ai longuement travaillé à accorder réel et fiction, la frontière n'est pas évidente.

Finalement c'est au cours de l'écriture que la fiction s'est invitée dans le réel, un peu à la manière des racontars arctiques. Selon Jörn Riel : «  un racontar, c'est une histoire vraie qui pourrait passer pour un mensonge à moins que ce ne soit l'inverse ».

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Groenland Vertigo comporte à l'évidence quelques clins d’œil aux aventures de Tintin dans l’Étoile Mystérieuse, comme la goélette l'Activ que vous avez rebaptisée l'Aurore du nom du navire polaire du Capitaine Haddock.

L'univers de Tintin m'a profondément marqué depuis l'enfance. Cet album, le premier que je réalise en solo, est un hommage à Hergé. L'album emprunte son titre à l'un des racontars de Jörn Riel mais évoque clairement l’Étoile Mystérieuse.

Il se trouve que notre navigation a été dans la réalité très proche de celle de cette aventure de Tintin : le voilier a fait escale à Akureyri, tout comme L'Aurore du Capitaine Haddock. Pour nos reconnaissances à terre, nous avons utilisé le flying boat, un drôle d'engin qui n'est pas sans rappeler le petit hydravion de l’Étoile Mystérieuse. Puis nous avons navigué au-delà du 72° parallèle, exactement là où le fragment de l'astéroïde s'est enfoncé dans la mer ! Hélas, nous n'en n'avons pas retrouvé la trace...

Tintin est-il aussi une source d'inspiration pour votre trait ?

Oui, c'est tout à fait exact. J'ai toujours été inspiré par « la ligne claire » d'Hergé. J'ai un peu plus poussé le style ligne claire pour les personnages avec la mise en couleurs réalisée par Isabelle Merlet. Par contre, j'ai conservé plus de réalisme dans les paysages, qui sont travaillés à l'aquarelle.

 

Vos personnages sont très proches de vos compagnons embarqués pour ce voyage au Groenland en 2011. Avec quelles inspirations les avez vous « retouchés » ?

Le personnage Jörn Freuchen est bien sûr inspiré de Jörn Riel, avec quelques touches dignes du capitaine Haddock et une influence certaine des portraits de trappeurs dressés par l'auteur des racontars. Mais il est aussi un hommage à l'explorateur danois Peter Freuchen, qui faisait sauter le petit Jörn Riel sur ses genoux en marquant la mesure avec sa jambe de bois ! J'ai aussi rebaptisé l'ornithologue de l'expédition le professeur Gustav Solsikke, qui est le nom danois de Tournesol. Et s'il n'y a pas de personnage féminin, ce n'est pas l'influence de Hergé mais c'est tout simplement qu'il n'y avait aucune femme à bord.

L'un de vos personnages, l'artiste Ulrich Kloster est particulièrement antipathique, c'est le vilain de l'histoire. Vous êtes vous inspiré de l'artiste initiateur du projet de 2011 ?

Il est vrai que cet artiste est riche et célèbre et n'était pas vraiment apprécié à bord. Manipulateur, égocentrique, finalement mon personnage lui ressemble d'assez près !

Votre regard sur un certain « art contemporain » et les « installations » semble plutôt acide, avez vous des comptes à régler avec ces mouvements artistiques ?

Non ! Je respecte tout à fait et j'apprécie l'art contemporain. Ce que je dénonce, c'est le côté égo démesuré et mégalomane de la part d'artistes, surtout lorsqu'ils s'emparent de sujets humanistes. Ce qui devrait les rendre humbles et c'est tout le contraire.

Vos prochains projets sont ils encore tournés vers le Groenland et d'autres Racontars ?

Hélas non, aucun voyage au Groenland n'est prévu. Je travaille actuellement à un projet de BD avec d'autres scénaristes, dans un style très différent.

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Groenland Vertigo
En librairie le 18 janvier 2017, 24x32 cm, cartonné, 104 pages couleur, 19 €
Copyright visuels : Hervé Tanquerelle / Casterman

Commentaires

  • Ah, ces Nantais ! Ils sont marins depuis tellement longtemps que même Noé avait besoin d'eux pour dénicher le mont Ararat où s'est échoué son arche après le déluge.
    Plus sérieusement, ils sont aujourd'hui petits-fils et arrières petits-fils de cap-horniers et ça se sent dans cet attrait de la mer et des grands espaces.
    Groenland Vertigo semble parfaitement aller au gré des courants océaniques de mon imaginaire.

  • en effet, un imaginaire qui emprunte à Jorn Riel, à Tintin dans l'Etoile mystèrieuse, et sûrement à bien des récits de navigateurs nantais. J'ai adoré ce récit où s'entremêle le réel de l'aventure vécue par l'auteur qui ressemble en bien des points à l'Etoile Mystérieuse et la fiction à la mode des racontars arctiques

  • Bonjour,

    j'aimerais contacter Hervé Tanquerelle, pour qu'il participe au magazine Plum, le numéro 4, qui sera dans 6 mois ou 1 an ?
    En vous remerciant
    Cordialement

  • Bonsoir

    Je n'ai pas ses coordonnées

    Contactez le via son site web
    http://tanquerelleherve.blogspot.com

    Meilleurs voeux à vous
    Stéphane Dugast

  • Gloups... je me souviens.
    C'est Dominique Simonneau qui a avait concocté cette interview, elle doit avoir les coordonnées de l'intéressé.
    N'hésitez pas à la contacter de ma part :
    Dominique Simonneau

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