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MÉLUSINE MALLENDER #4 : LES RÈGLES DU VOYAGE
27 000 kilomètres à moto et en solitaire à travers 14 pays de l’Asie du Sud, c'est l'expédition accomplie par Mélusine Mallender depuis l'Indonésie jusqu'à l'Iran, via notamment le Myanmar, le Bangladesh, l’Inde, le Népal ou encore le Pakistan. Un voyage en moto réalisé en solitaire nécessitant des règles à respecter.
(LIRE L'ÉPISODE PRÉCÉDENT) Sur la route, les rencontres sont souvent spontanées avec Mélusine Mallender : «Je suis comme un messager à qui l'on peut tout confier sans être jugé. Car je ne suis que de passage». D'autres rencontres sont en revanche préparées bien en amont de l'expédition : «C'est le fruit d'une enquête et d'une réflexion. Je sais ce que je viens chercher. Cela se passe généralement bien !».
Mélusine laisse aussi place à l'improvisation et à l'intuition, en prolongeant parfois son séjour chez l'habitant. «C'est un tout. Une envie de partager du temps. Un dialogue qui se construit. Une confiance qui se tisse. Ce sont les plus belles rencontres», s'enthousiasme la motarde-exploratrice avant de rappeler une évidence : «Il faut aussi savoir à un moment partir, sinon cela serait des vacances !».
D'autres règles prévalent également surtout lorsque l'on voyage seule et que l'on est une femme : «Il faut ni être parano, ni être insouciante. Le soir au bivouac, il faut éviter les endroits trop isolés. Repérer les rôdeurs et ces types louches qui passent et repassent. Il faut chercher à tout prix la présence de femmes et d'enfants. Grâce à l'expérience et à l'observation, je n'ai jamais eu de problème mais il faut demeurer constamment vigilante».
A ces désagréments s'en ajoutent un dernier, le manque de toilettes sur la route : «Il y a du monde partout et tout le temps en Asie. J'en ai pris mon parti. Le plus frappant, c'est le monde quand je m'arrête. J'ai rapidement une centaine de curieux autour de moi. C'est déroutant au départ mais c'est ce qui fait le charme de cette expédition. Avec ma moto, je débarque au cœur de la vie des gens et je suis dans le partage».
Quant au dialogue, il s'établit vite à l'exception du Myanmar, un pays et des habitants difficiles à décrypter : «A cause de la dictature, les gens sont craintifs. Ils ont été brimés pendant des années. Les intellectuels, ou ceux qui pensaient, étaient emprisonnés. L’éducation n’était qu’embrigadement. Et l’information de la propagande. Alors se faire expliquer ce qu'est a liberté… C'est d'ailleurs un mot qui n'existe pas dans leur vocabulaire. C'est même souvent l'équivalent de «temps libre» pour eux ! Cela peut créer des scènes cocasses comme cette femme qui souriait à grandes dents à toutes mes questions. Après traduction, ce qu'elle me disait était en fait horrible. Le sourire en Asie cache beaucoup de misères et d'angoisses». Les vérités de la route sûrement ! (À SUIVRE)
Stéphane DUGAST
Auteur, reporter et secrétaire général de la Société des Explorateurs Français
Photographies © Zeppelin-network