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MOT INUIT : MONTAGNE DANS LA GLACE

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Certains mots d'origine inuite ou groenlandaise sont passés dans la langue française. Souvent importés via les récits des illustres explorateurs des régions arctiques, ils ont vu parfois leur sens évoluer avec le temps, ou même désigner une chose spécifique du Grand Nord. Nouvel exemple un peu mystérieux vécu sur le terrain par Pascal Hémon, chroniqueur fidèle du blog Embarquements.

Aujourd'hui est un jour blanc. Vraiment blanc. Partout.

Après la pluie, puis la neige, l'altitude qui augmente progressivement, nous arrivons dans les nuages. Littéralement, pas au figuré.

Au matin de son troisième jour, cette traversée du Groenland nous plonge dans un univers étrange. Partis depuis la banquise, au niveau de la mer, nous hissons difficilement nos pulkas de 120 kg sur la calotte glaciaire. Une longue, très longue, montée en altitude jusqu'à 2500 m. Hier, en doublant une dernière moraine, nous entrions dans le vif du sujet : un océan de glace à perte de vue.

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Mais aujourd'hui la vue ne sert pas à grand-chose. Tout est blanc. Seuls mes spatules ou mon équipier Fabrice viennent troubler l'éther cotonneux qui s'enroule sur nous.

La progression est lente mais continue. Nous prenons chacun à notre tour la position de tête, pas encore habitués à cet environnement étrange qui désoriente les sens et déséquilibre le pas.

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En milieu de journée une petite tache plus sombre apparaît progressivement sur notre cap. D'abord grisâtre, elle noircit au fur et à mesure de la progression. Qu'est ce que cela peut être ? Les interrogations occupent nos esprits. La tache, bien visible, semble encore bien loin. Ou bien est-elle toute proche ? Difficile à dire. La météo reste stable. Toujours le grand blanc. Imperturbable.

La tache prend progressivement la forme d'un triangle pointé vers le ciel. Mais la fatigue et la faim vont bientôt nous obliger à planter le bivouac. Sans savoir ce qu'est cette pyramide. Un coup d'œil à la carte confirme qu'il n'y a rien que la glace devant nous, sur 700 km. Les conjectures sur cet objet non identifié ne nous empêchent pas de sombrer de fatigue enfouis dans nos duvets.

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Au réveil, grand beau. Un soleil radieux, aveuglant, illumine intensément la calotte. Le temps d'enfiler des lunettes de glacier et le mystère de la veille s'éclaircit.

Un NUNATAK !

Ce mot d'origine groenlandaise et bien connu des montagnards désigne le sommet émergé d'une montagne noyée dans la calotte glaciaire.

Nous sommes à plus de 2000 m d'altitude, face à une jolie pyramide de roche d'au plus une dizaine de mètres. Escarpée elle serait normalement bien difficile à escalader, mais la présence de la glace nous permet d'atteindre facilement son sommet.

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La virginité de l’inlandsis
contient des dents de roche
des strates, des chatoiements
créés par la nature même
avec la force de l’univers

Extrait de « Au dessus de l’inlandsis » du poète groenlandais Kristian Olsen aaju.


Mots inuits précédents : ANORAK IGLOO

Pascal Hémon
www.diagonale-groenland.asso.fr

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